La personnalité du « boulanger Jocteur » est signifiée par une appropriation singulière de ses espaces d’activité. En première lecture, il est remarqué une sensibilité toute particulière portée sur l’authenticité du site, son histoire, son architecture et son lien urbain et humain. La maison Jocteur sait conserver les valeurs patrimoniales de ses acquisitions et place son intervention suivant une apparente présence éphémère, ou plutôt virtuelle, ou les deux à la fois, mais avec mesure. A la découverte d’un de ces espaces, nous hésitons entre l’affirmation : la boulangerie est à l’origine du lieu, ou : l’entreprise s’est appropriée le site opportunément sans véritablement s’aménager. L’utilisation des moyens est en mouvement, rien n’est définitif, tout peut évoluer. Le résultat ne donne pas un lieu, mais une ambiance, chaleureuse, humble et particulièrement adaptée. La retranscription du concept, dans un local brut de béton impose une approche permettant de substituer à l’absence de passé, une histoire qui tisse un lien avec la personnalité « Jocteur ». Ainsi, nous pensons adapter le site par une écriture en mouvement, éphémère, provisoire, pour absorber cet espace trop neuf, bas de plafond, et dont plusieurs aspects ne se conforment pas aux attentes (isolation périphérique, béton banché apparent, forme géométrique trop parfaite, liaison menuiserie avec maçonnerie, etc…). La cellule sera plaquée de plâtre pour recevoir un revêtement de carrelage au sol, aux murs, et au plafond. Le revêtement de préférence blanc aura la particularité d’être posé suivant des calepinages dessinés pour amener ou pour s’opposer à l’agencement. Il pourra être utilisé des carreaux, en lame, en carré, en rectangle et même en opus incertum. Les poteaux et les poutres de structure émergeront et seront enduit d’une lasure incolore qui assombrira et brunira le béton. Les câbles, tubes, tubulures, branchements, etc…, seront gérés apparents. Les deux seuls volumes des commodités et de la réserve seront pensés comme des containers en acier, laqués ou oxydés, posés aléatoirement au sol, en transite, provisoirement. Ils seront l’expression d’espaces, ni intérieurs, ni extérieurs, qui supporteront des luminaires de type urbain réinvestis par un éclairage approprié. Le mobilier prendra sa source d’inspiration et de design dans la contribution des années soixante et soixante-dix, où le stratifié coloré des remplissages partageait la vedette à l’acier chromé des structures : table à rallonges italienne, tabourets empilables d’Alvar Alto, chaise monobloc en contre-plaqué et tubulure acier de Robin Day, aménagement de métal et bois en fond de Charles Eames, teinté « d’objet Pop ». Histoire remplacée par culture, nous souhaitons aborder le sujet suivant un design emprunt à une diversité « pop » contenu dans une enveloppe de carrelage blanc influencée par le travail artistique de J.P. Raynaud et suivant une pertinence éphémère en mouvement propre à notre temps. Une interprétation contemporaine d’un « Jocteur » nomade en quête des racines de son nouveau site.
JOCTEUR Boulanger Tassin la Demi Lune
Architecture & Gourmandise